Le Cri, Munch
Texte
Dans le texte de Rousseau ci-dessous, l'homme s'empare d'un terrain qu'il entoure d'une clôture, indifférent à l'idée de partage public ou commun, guidé par son intérêt propre. Le partage divise l'espace en deux espaces : espace privé et espace public. La parole se voit alors aussi partagée : il y a celui qui parle et ceux qui écoutent.
"Le premier qui ayant enclos un terrain, s’avisa de dire, ceci est à moi, & trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères & d’horreurs n’eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables: Gardez-vous d’écouter cet imposteur; vous êtes perdus si vous oubliez que les fruits sont à tous, & que la terre n’est à personne ! Mais il y a grande apparence qu’alors les choses en étoient déjà venues au point de ne pouvoir plus durer comme elles étoient: car cette idée de propriété, dépendant de beaucoup d’idées antérieures qui n’ont pu naître que successivement, ne se forma pas tout d’un coup dans l’esprit humain: il falut faire bien des progres, acquérir bien de l’industrie & des lumieres, les transmettre & les augmenter d’âge en âge, avant que d’arriver à ce dernier terme de l’état de nature."
Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, seconde partie
Questions
1. Le cri fait irruption : qu'est-ce qu'un cri ? Pourquoi est-ce celui qui dit "ceci est à moi" qui l'emporte ?
2. La parole appartient-elle à tous ?
3. Prendre part n'est pas prendre sa part : celui qui intervient refuse de prendre part au vol. Quelle est finalement l'origine du partage ?